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Les fibres synthétiques partie #1

Demandez à un féru de randonnée, à une passionnée de ski ou même au voisin qui promène son chien matin et soir quel vêtement est son meilleur allié en cas de mauvais temps, et sa réponse sera certainement un article fabriqué entièrement ou en partie à partir de fibres synthétiques. Depuis l’invention du nylon (pour remplacer la soie) par l’Américain Wallace Carothers dans les années trente, les fibres synthétiques sont devenues omniprésentes dans l’industrie textile mondiale, pour la fabrication de vêtements comme pour la décoration d’intérieurs. Les consommateurs les ont rapidement adoptées en raison, au départ, de leur bas prix et de leur facilité d’entretien.

Aujourd’hui, les fibres synthétiques sont devenues de véritables prouesses technologiques : légères, chaudes, imperméables et séchant rapidement, elles sont partout : pantalons en spandex, vestes en Gore-Tex, chandails en molleton polaire, et bien d’autres. De nouvelles fibres s’adaptent à la température du corps pour rafraîchir la peau ou contiennent des semi-conducteurs, ce qui relevait encore de la science-fiction il y a à peine cinquante ans.

Le problème, c’est que ces innovations ont un prix : des ressources non renouvelables sont extraites pour produire ces fibres, qui servent à fabriquer des vêtements dont la durée de vie est très limitée, et qui, même s’ils sont en fait composés de matériaux plastiques conventionnels, sont très rarement recyclés, car les usines de tri ne les acceptent pas. Or, ces fibres peuvent mettre plus de 200 ans à se décomposer. Soit elles forment une couche quasi permanente dans les décharges, soit elles s’envolent en fumée dans les incinérateurs, produisant des émanations toxiques qui doivent être filtrées soigneusement pour limiter la pollution de l’air. De plus, l’abrasion lors du lavage libère des microfibres plastiques qui sont déversées dans les cours d’eau et les océans : plusieurs études ont déjà démontré l’accumulation de plastique dans les mollusques, les poissons et les mammifères marins, et dans les sédiments au fond des lacs.

La meilleure façon de limiter la production de plastique destinée à l’industrie du textile est pour les consommateurs d’acheter moins de vêtements de ce type et de choisir des textiles dont la durée de vie est beaucoup plus longue. On peut aussi choisir des articles dont les fabricants respectent les normes écologiques établies par l’organisme suisse Bluesign (on en trouve chez Mountain Equipment Co-op au Canada).

Signe encourageant, les fabricants de textile et l’industrie du prêt à porter commencent à prendre au sérieux le problème du gaspillage du plastique et de la pollution par les microplastiques. Lentement, plusieurs entreprises abandonnent le modèle linéaire (fabrication, utilisation, rejet) au profit du modèle circulaire (où le fabricant recycle ses produits à la fin de leur vie utile).

Ainsi, quand votre veste en molleton devient une pile de bouloches, le fabriquant la reprend pour la recycler ou fabriquer de nouveaux vêtements, réduisant ainsi la nécessité de se procurer des fibres synthétiques neuves. Cela réduit la consommation globale de d’hydrocarbures fossiles non renouvelables et les émissions de gaz à effet de serre causées par l’industrie textile (actuellement 1,2 milliards de tonnes par an, soit plus que tous les transports aériens et maritimes cumulés !).

Un exemple de ces efforts est la collaboration entre Adidas et Parley, qui fabriquent des espadrilles à partir du plastique repêché dans les océans. La marque de vêtements de plein-air Haglöfs recycle des plastiques en fin de vie pour fabriquer une membrane imperméable, elle-même conçue pour être facilement recyclée. Un autre exemple est celui de l’inventeur de PrimaLoft, une forme de duvet synthétique, qui a annoncé une version plus écologique de son produit, PrimaLoft Bio, en 2020. Polartec, inventeur du molleton polaire, a récemment créé Polartec Power Air, un molleton qui libère cinq fois moins de microfibres au lavage que le molleton traditionnel.